15/11/2009

Le baron de BATZ



C'est un bien mystérieux et original personnage que ce baron Jean-Pierre de Batz, né le 26 janvier 1754 à Gouts, pays de la famille de Chambre, lieutenants généraux de la sénéchaussée de Tartas dont était issue sa grand-mère ayant épousé Jean-François de Batz, avocat au Parlement.


acte de baptême à Tartas le 27 janvier 1754 (A. D. Landes)

Pour les frères Goncourt, "Cet homme est un Protée, Catalina et Casanova brouillés dans un seul homme" ( l'Histoire de Marie Antoinette- 1858). Ils précisent : " La tête et la plume aux intrigues, le bras aux coups de mains, il est un diplomate et un aventurier. Cet homme est partout et, où il n'est pas, il menace. Il est ici et là, hier une ombre, aujourd'hui un éclair, trouant les lois comme des toiles d'araignées, passant à travers les règlements, les consignes, les barrières"

Lamartine le qualifie en 1847 "d'aventurier de conspirations" ( Les Girondins Livre XXXV) au mécontentement de sa famille dont le vicomte de Batz d'Aurice.

Il est de fait plus connu dans la littérature romanesque que dans l'histoire. Il a ainsi inspiré la baronne Orczy dans son El Dorado (1913), Rafael Sabatini dans son Scaramouche (1921) et, plus récemment, Juliette Benzoni dans la série Le jeu de l'Amour et de la mort (1999).

Mais pourquoi donc ????

Longtemps méconnu et ignoré des historiens, celui appelé « l’homme invisible » par Robespierre fait pourtant l’objet d’une importante littérature, du romanesque aux fantasmes multiples nés d’une vie quelque peu rocambolesque. Il entre cependant dans la petite Histoire par un coup d’éclat du 21 janvier 1793 digne de l’intrépidité d’un Gascon qu’il était.

Royaliste convaincu, contre-révolutionnaire actif, c’est au matin de ce jour là, en effet, qu’il tenta de délivrer Louis XVI sur le trajet qui le menait de la prison du Temple à l'échafaud monté sur l’actuelle place de la Concorde lieu de son exécution. L’audacieux projet était de soulever la foule lors du passage de la voiture du roi, malgré l’escorte de cavalier et plusieurs rangs de gardes nationaux et de sans culottes, et profiter de la confusion. Le roi délivré devait ensuite être caché dans une maison appartenant au comte de Marsan, rue de Cléry toute proche. Cela se passa précisément dans le quartier de Bonne-Nouvelle, à l’angle de la rue Beauregard et de la minuscule rue des Degrés.


Pour ce faire, il avait bien convoqué des amis royalistes conjurés, mais beaucoup renoncèrent, peut-être dénoncés, et seuls vinrent quelques résolus trop peu nombreux.. Le baron de Batz armé d’un sabre s'élança pourtant au passage du convoi en criant : « A nous, ceux qui veulent sauver le Roi ! ». Ce fut à la vérité un fiasco : deux de ses complices furent poursuivis et vite rattrapés et tués ; un troisième, son secrétaire Devaux, fut pris. C’est par le témoignage de ce dernier devant le tribunal révolutionnaire que ces circonstances sont connues. (Il fut exécuté le 17 juin 1794). Batz, toujours chanceux, réussit à s'échapper et s'enfuir en Angleterre.

A l’occasion du bicentenaire de la Révolution, la mairie de Paris a apposé au 52 de la rue Beauregard, une plaque comémoratrice rappelant l’endroit de cette tentative.



On a dit que le dessin d’enlever le roi de vive force remontait à l’époque même du procès et qu’il avait renoncé une première fois à le tenter au Temple

Bien que recherché (une importance prime était offerte par le comité de surveillance et de sûreté générale de la Convention à celui qui le livrerait), le baron, qui disposait de diverses retraites sûres dans Paris et les environs, n'en poursuivit pas moins, selon les diverses accusations portées contre lui, un plan pour l'enlèvement et l'évasion de Marie-Antoinette et de la famille restant détenues au Temple. Mais, bien que parvenant à gagner plusieurs des membres de la Convention ou de la commune, et des complicités à l'intérieur même de la garde de la prison, il échoua encore. Après ce nouvel échec, il aurait même persévéré, dit-on, en voulant soustraire la reine lors de son transfert à la Conciergerie. Mais, de tout cela, rien n‘est vraiment prouvé.

Pourtant, le 14 juin 1794, Élie Lacoste, au nom des comités de salut public et de sûreté générale réunis, lut un long rapport à la convention sur cette conspiration. « Un vaste plan, dit-il, était tracé par les puissances coalisées et par les émigrés; les conjurés ayant pour but l'enlèvement de la veuve Capet, la dissolution de la convention et la restauration de la monarchie. Tous les leviers destinés à renverser la république étaient mus par un seul homme... le baron de Batz ».

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Qui était vraiment le baron de Batz ?


Jean Pierre de Batz d'Armanthieu ( caverie sur la rive droite de la Midouze près de Bégaar ) est né le 26 janvier 1754 à Gouts. Il est le fils de Bertrand de Batz modeste avocat  et lieutenant criminel au siège de Tartas et de son épouse Marie de Laboge veuve Junca (négociant à Mont de Marsan)

Ambitieux, sans doute inspiré par le souvenir de Charles de Batz - d'Artagnan - il devint courtisan, obtint le titre de baron en 1776 et un brevet de colonel de cavalerie, se fit faussement accorder en 1780 des quartiers de noblesse qu'il n'avait pas, mais aussi, s'enrichit en fréquentant les milieux financiers et fondant même la première compagnie d'assurance sur la vie. Ce fut donc d’abord un excellent « brasseur d’affaires »

Ambitieux , astucieux et peu scrupuleux voire imposteur et usurpateur c est par l'argent gagné par la spéculation, l'agiotage, les intrigues et "affaires", ainsi que par les protections de ses obligés que ce financier habile et retors  s'éleva jusqu'à la noblesse de cour. Argentier de cette cour, il fut même créancier de Louis XVI pour plus de 500 000 livres

Devenu assez riche, il acheta la charge de grand sénéchal du duché d’Albret au siège de Nérac, et se fit élire député de la noblesse de cette sénéchaussée aux Etats généraux de 1789 avant de siéger à l'Assemblée constituante dont il fut membre du comité des finances, sa spécialité.

Un temps émigré à Coblentz ou il devient aide de camp du prince de Nassau, il rentra en France en 1792 et semble avoir été, dans l’ombre, en relation d’argent occulte avec le roi Louis XVI dont le livre des comptes écrit de sa main mentionne le 1er juillet 1792 « Retour et parfaite conduite de M. Batz, à qui je redois 312,000 francs, ». Apres l'arrestation de la famille royale, il est en septembre à Bruxelles.( On a dit qu’il aurait également financé la fuite à Varennes), On a dit qu’il disposait de fonds pratiquement inépuisables venus d'Angleterre,en relation avec les émigrés, voire d'un atelier de faux assignats dans la cave de sa maison de la rue de Charonne à Paris acquise en 1787.

Spéculateur malin, chargé d'affaires plus ou moins occultes, investissant dans diverses compagnies financières plus ou moins douteuses il semble avoir aussi beaucoup corrompu et compromis, y compris certains membres influents de la Convention jusqu'à Danton, et largement profité de ses relations et protections.

Trempant dans de multiples affaires financières plus ou moins louches, utilisant la cupidité de tous à son profit il voyagea également dans toute la France, et parfois contraint de séjourner en Allemagne Angleterre, Suisse, Espagne.


Convaincu d’avoir dirigé plusieurs des sections de Paris lors de l'insurrection royaliste du 13 vendémiaire an IV contre la Convention thermidorienne (5 octobre 1795), il fut arrêté mais réussit à se faire libérer de la prison installée au collège du Plessis. Arrêté à nouveau après le coup d’état du second Directoire en 1797, il s’évada pour se réfugier en Suisse.

Il rentra en France pendant le Consulat, en 1800, s'étant fait radier de la liste des émigrés, mais ne se mêla plus des affaires politiques et resta désormais discret en échange de son impunité et sa sécurité promises par Fouché.

Il se retira alors dans sa terre et château de Chadieu qu’il avait acquis en 1793 près de Clermont en Auvergne. Il y vécut dans l'opulence que lui procurait sa fortune. La Restauration le récompensa de ses services par 1a croix de l’Ordre de Saint Louis dès 1814, le grade de maréchal de camp en 1816, et l’éphémère commandement militaire du Cantal en 1817.


Il mourut en son château le 10 janvier 1822, à l’age de 67 ans d'une attaque d'apoplexie, encore que pour certains même sa mort resta suspecte, parlant de suicide pour un motif aussi obscur que sa vie rocambolesque. Son corps fut inhumé à l’ancien cimetière d'Authezat, puis transféré en1854, dans le cimetière actuel.




château de Chadieu


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Si le baron de Batz fut chanceux, ses proches le furent moins : Il eut pour maîtresse, une ancienne actrice de la Comédie Italienne, Marie de Grandmaison, qui préfèrera finir sur l'échafaud le 17 juin 1794 plutôt que le trahir. En 1808, il épousa Augustine Michelle, dite Désirée, Thilorier, fille d’un conseiller au Parlement de Bordeaux, mais dont la mère avait également été exécutée comme complice du baron.

le château du baron de Batz à Gouts

C'est lui qui racheta les seigneuries de Carcarès et de Sainte-Croix où il fit restaurer le château féodal dont il fut fait baron en 1776.
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voir biographie Wikipédia




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